Course à la chefferie du PQ : la question de l’immigration divise les candidats

Écrit par sur 2 mars 2020

Les candidats aspirants à la direction du Parti québécois (PQ) se sont présentés lundi à la permanence de la formation, à Montréal, pour retirer leur bulletin de candidature. Cette étape charnière, qui lance officiellement la course à la chefferie du parti, révèle également des divergences sur la question de l’immigration.

Les bureaux de la permanence du PQ accueillent lundi les quatre aspirants chefs du parti : le député de Jonquière Sylvain Gaudreault, l’avocat Paul St-Pierre Plamondon, l’humoriste Guy Nantel et l’historien Frédéric Bastien. Les trois premiers ont retiré leur bulletin en matinée, tandis que M. Bastien est attendu dans l’après-midi.

Les candidats, qui ont déjà annoncé leurs intentions depuis plusieurs semaines, viennent ainsi compléter les procédures administratives et verser le dépôt de 10 000 dollars nécessaire pour déposer leur bulletin de candidature. Ils auront désormais cinq semaines, soit jusqu’au 9 avril, pour recueillir les 2000 signatures de membres, dans un minimum de 9 régions et 50 circonscriptions.

Un second versement de 15 000 dollars leur sera demandé à la fin de cette période.

Réduire les seuils d’immigration

Alors que la course n’en est encore qu’à ses balbutiements, le débat sur l’immigration fait déjà figure de point d’achoppement entre les différents candidats.

Paul St-Pierre Plamondon est catégorique, il faut réduire temporairement les seuils de 35 000 à 40 000 personnes acceptées au Québec, et ce, tant que le déclin de la langue française ne sera pas endigué au Québec. Il propose entre autres de mieux franciser, mais aussi de régionaliser les nouveaux arrivants.

Je ne m’empêcherais pas de débattre de chacune des questions pertinentes sur l’avenir du Québec. De la même manière que l’on va avoir une discussion sur l’accession à l’indépendance et sur la langue française, a-t-il déclaré.

On ne peut pas être dans le tabou autour de certaines questions parce qu’on a peur du traitement médiatique qui va en découler.

La proposition du candidat péquiste n’est pas sans rappeler celle de la Coalition avenir Québec (CAQ) au pouvoir, qui a réduit le seuil d’immigration de la province de 50 000 à 40 000, avant de faire marche arrière et d’annoncer un retour progressif à l’ancien seuil d’ici 2022.

L’avocat de 43 ans, qui refuse tout amalgame avec la CAQ, a qualifié d’irresponsable ce retour en arrière de François Legault.

Le gouvernement propose de rehausser les seuils au même niveau que sous les libéraux, a-t-il asséné lundi matin en conférence de presse.

Il assure toutefois être en faveur de l’immigration, mais souhaite faire de la maîtrise du français le premier critère dans la sélection des candidats, et ce, avant les besoins économiques.

Cette réduction du seuil d’immigration est également au programme du candidat péquiste Frédéric Bastien, qui préconise pour sa part un seuil de 25 000 à 30 000 immigrants par année. Un niveau déterminé sur celui de l’ère Bouchard [1996-2001].

Frédéric Bastien, lundi après-midi

Photo : Radio-Canada

Avec une position bien affirmée sur les questions identitaires, l’historien de 51 ans demande en plus d’une réduction des seuils d’immigration un durcissement de la loi sur la laïcité. Il dit vouloir porter « calmement, mais fermement » ces enjeux, car il estime trop dangereux de laisser ces questions aux « populistes extrémistes ».

Est-ce qu’il y a des sujets dont on ne doit pas parler ? Ce n’est pas sain de ne pas parler des sujets qui préoccupent les gens. Est-ce qu’on va abandonner ces questions-là à l’extrême droite, qui va pointer du doigt les immigrants ? Non, l’immigration est une question importante.

En janvier, Frédéric Bastien avait notamment affirmé que le Québec accueillait deux fois et demie plus de nouveaux arrivants que la France, tout en étant une société minoritaire n’ayant pas de moyens additionnels, selon lui, pour les intégrer.

Position plus nuancée

Associé à l’aile gauche du PQ, le député Sylvain Gaudreault croit au contraire qu’il faudrait « dépolitiser » ces questions d’immigration. Il souhaite à cet effet créer un observatoire afin de déterminer les fameux seuils, qui seront alors évalués en fonction des enjeux démographiques, de main-d’oeuvre et de développement régional.

Appuyé par l’avocat spécialisé en immigration Stéphane Handfield, le candidat péquiste reproche à ses adversaires de vouloir piger dans des boîtes le nombre d’immigrants sans analyses sérieuses préalables, et de favoriser par la même occasion l’approche populiste.

Le député de Jonquière Sylvain Gaudreault, lundi matin

Photo : Radio-Canada

Pour l’ex-ministre des Transports, des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire sous le gouvernement minoritaire de Pauline Marois, le recours à une structure indépendante est nécessaire pour évaluer ces questions de façon pertinente et dépassionnée.

Oui, on va parler d’immigration, comme on va parler des autres enjeux. Mais ce n’est pas vrai que c’est la seule question qui déterminera qui sera chef du PQ. Sans diminuer l’importance du rôle de l’immigration, il reste que pour vouloir être chef de ce parti et premier ministre, il faut aussi parler d’autre chose.

Une position plus nuancée semblant être partagée par le candidat Guy Nantel, qui prêche également en faveur d’une politique de l’immigration éclairée.

Guy Nantel, lundi matin

Photo : Radio-Canada

Pour sa première course à la chefferie, Guy Nantel veut d’abord « connaître les raisons et les problématiques liés à l’immigration » avant de brandir des chiffres. Selon lui, il ne faudrait pas tomber dans la polémique nourrie qui a alimentée les dernières élections au Québec.

Lancer des chiffres pour lancer des chiffres et se lancer dans une guerre d’enchères, ce n’est pas suffisant. […] Il est crucial d’avoir le bon ton pour en discuter.

L’humoriste souhaite avant tout favoriser l’intégration des personnes issues des communautés culturelles. Il a notamment plaidé en faveur d’une nouvelle constitution qui, selon lui, affirmera haut et fort la pérennité de la langue française en Amérique du Nord.

Guy Nantel a toutefois souligné l’importance d’un débat autour des questions identitaires. Il dévoilera son plan le 18 mars.

Convaincre

La période officielle de mise en candidature se déroulera du 2 mars au 9 avril. Le prochain chef péquiste sera désigné le 19 juin prochain, sous la présidence de l’ancienne députée Agnès Maltais. Les débats auront lieu entre le 15 avril et le 20 mai, mais les dates n’ont pas encore été annoncées.

En vertu de nouvelles règles, les membres du parti, mais aussi tous ses sympathisants, pourront voter pour élire le nouveau chef, en échange d’une contribution de 5 dollars.

Pascal Bérubé, le député de Matane-Matapédia, dirige actuellement la formation de façon intérimaire depuis la démission de Jean-François Lisée après sa défaite électorale d’octobre 2018.


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