Le Québec doit accueillir plus de réfugiés, clament l’ONU et des organismes

Écrit par sur 21 février 2020

« Les besoins sont toujours criants », affirme Denise Otis, cheffe du bureau montréalais du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), dans une entrevue accordée à Radio-Canada.

Augmenter le nombre de réfugiés accueillis au Québec est « la conviction » de cet organe onusien, alors que le gouvernement Legault avait décidé l’an passé de baisser d’environ 20 % le nombre de personnes admises dans cette catégorie.

Ça sauve des vies, il ne faut jamais oublier ça.

Une telle augmentation n’est cependant pas dans les plans, à court terme, du gouvernement caquiste. Celui-ci a déjà pris la décision de ne pas augmenter, dans les prochaines années, le nombre de réfugiés admis dans la province. Une capacité d’accueil limitée a notamment été mise de l’avant par le premier ministre François Legault.

Cette proportion sera même en baisse, puisque dans le même temps, Québec compte hausser le pourcentage d’immigrants économiques acceptés.

En 2019, 7248 réfugiés ont été admis au Québec. Ce chiffre devrait rester similaire jusqu’en 2022, selon les projections déjà mises de l’avant par le gouvernement provincial.

Le gouvernement a expliqué qu’il avait réduit les cibles pour mettre un peu plus l’emphase sur l’intégration. On est tout à fait pour la vertu, c’est important et on le reconnaît. Mais l’un peut aller avec l’autre [car] la société québécoise a développé des bonnes pratiques et est vraiment très forte. Il ne faut pas que l’expertise se perde, souligne Denise Otis.

On espère que ce ne sera que temporaire et qu’on pourra reprendre la conversation avec le gouvernement, soutient-elle.

Chaos lors du dernier dépôt des demandes de parrainage

Cette volonté de revoir à la hausse est grandement partagée par les organismes qui ont soutenu des groupes privés voulant parrainer des réfugiés. Ces derniers, le 20 janvier, ont vécu un douloureux épisode pour tenter de déposer leur dossier.

Certains ont attendu durant quatre jours dans le Vieux-Montréal, d’abord à l’extérieur dans un froid glacial, avant de patienter dans les locaux du ministère qui avait décidé, vendredi soir, d’ouvrir finalement ses portes. Les dossiers étant traités sur la règle du premier arrivé, premier servi, un chaos a été constaté, avec notamment des tentatives de soudoiement dénoncées par plusieurs personnes sur place.

Les parrains devaient par ailleurs faire appel à un coursier pour donner en main propre les documents nécessaires. Une surenchère a également été déplorée. Le ministre de l’Immigration a déjà promis de mettre fin, à l’avenir, à un tel système.

Au total, 100 places étaient réservées pour ces groupes de 2 à 5 personnes souhaitant parrainer un réfugié, alors que des centaines de Québécois souhaitaient profiter de ce programme, qui avait été suspendu depuis septembre 2018. Ce sont par ailleurs ces groupes qui prennent en charge financièrement l’accueil de ces immigrants.

Combien de dossiers sont acceptés?

Depuis 2018, le nombre de places pour le parrainage collectif a été limité à 750, dont 100 pour les groupes de 2 à 5 personnes. Les organismes se partagent le reste des places. La plupart n’ont pas eu besoin de se rendre devant le ministère le 20 janvier, leurs demandes sont garanties durant plusieurs mois.

De l’avis de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI), qui regroupe une centaine d’organismes, Québec doit augmenter « significativement » ces chiffres, particulièrement pour les groupes privés. Cette vision est partagée aussi par le Réseau des organismes et groupes de parrainage des réfugiés au Québec (ROGPRAQ).

On ne parle pas de 50 ou 100 places en plus, soyons clairs. Il en faut plus du double, minimalement. Il faut trouver quelque chose en accord avec l’engouement des Québécois pour parrainer des réfugiés.

Cette problématique est vécue également par des organismes expérimentés, comme Action réfugiés Montréal, qui assure avoir une liste d’attente de près de 700 noms. On n’a accepté aucun nouveau dossier depuis 2017. Les gens qu’on va inviter pour déposer des dossiers cette année nous ont contactés en 2015, affirme le directeur, Paul Clarke.

Une meilleure communication demandée

Ces groupes réclament un meilleur dialogue avec le gouvernement. Ce désir fait partie d’une série de revendications qui seront envoyées au gouvernement Legault.

On aimerait une mise en place d’un mécanisme de consultations régulières. Depuis ce fiasco, on n’a eu aucun contact avec le ministère. Avec un meilleur dialogue, on pourra faire remonter les besoins, les problèmes et les enjeux que vivent les organismes et les parrains, soutient Neal Santamaria.

Ces organismes insistent notamment sur le fait que les réfugiés parrainés s’intègrent pleinement, grâce à leurs parrains, et contribuent à l’économie québécoise. Une étude de Statistique Canada (Nouvelle fenêtre) révélait d’ailleurs, début janvier, que ces réfugiés parrainés ont des taux d’emploi et des revenus plus élevés que les réfugiés pris en charge par l’État.

Les revendications des organismes

Les différents organismes venant en aide aux réfugiés demandent une hausse du nombre de places dans le cadre du programme de parrainage collectif, ainsi qu’une augmentation du nombre de réfugiés admis annuellement au Québec. Ils souhaitent aussi revoir le processus du dépôt des demandes, avec par exemple la possibilité de déposer un dossier sur Internet ou encore de se rendre dans un point de service régional.

Face à la pénurie de main-d’oeuvre, les réfugiés peuvent jouer un rôle, ajoute l’organe des Nations unies, qui aimerait convaincre le gouvernement Legault d’instaurer un autre système de parrainage de réfugiés, le Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas (RDBV), déjà disponible dans le reste du Canada.

Dans ce programme, le gouvernement participe durant six mois au soutien financier de ces immigrants.

D’une manière générale, reprend Denise Otis, les réfugiés ont des capacités et peuvent répondre aux besoins des employeurs. Ce serait une autre façon de faire en sorte que ces gens-là puissent avoir une nouvelle vie et de faire profiter de leur talent la société, mentionne-t-elle.


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